En Afrique, la lutte contre le travail des enfants se poursuit

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  • Publié le: mercredi 18 septembre 2019

Alors qu’aujourd’hui encore, un enfant africain sur cinq travaille, de nouvelles initiatives voient le jour pour mettre un terme au fléau de travail des enfants. 

Les chiffres sont encourageants, mais la route est encore longue. Selon l’Organisation internationale du travail (OIT), le nombre d’enfants qui travaillent dans le monde a reculé de 94 millions entre 2000 et 2016. Mais ils seraient encore 152 millions à exécuter des tâches dangereuses ou compromettant leur éducation comme l’élevage de bétail, le ramassage des ordures, l’extraction minière… Sans compter les milliers d’enfants-soldats recrutés par les forces armées gouvernementales pour servir de combattants, de porteurs ou de cuisiniers. Selon l’OIT, 4,3 millions de garçons et de petites filles seraient réduits en esclavage à ce jour.

Riche ou pauvre, aucune région du monde n’échappe à ce fléau. Récemment en Europe, le Coréen Samsung a été accusé de faire travailler des enfants dans plusieurs pays asiatiques. En Afrique, où près d’un enfant sur cinq travaille, la situation est particulièrement préoccupante. « Un progrès marqué sur ce continent est vital pour faire reculer le travail des enfants dans le monde », considère l’OIT. C’est dans le secteur de l’agriculture que les enfants africains sont majoritairement mis au travail, notamment dans les plantations de cacao. En Côte d’Ivoire, un tiers des enfants de six à neuf ans travaillerait à la récolte de cet or noir. Ils viennent du centre ou du nord du pays, mais aussi du Mali, du Burkina Faso ou du Togo. Au Burkina Faso et en République démocratique du Congo, des mineurs sont exploités dans les mines d’or ou de cobalt. Dans la capitale égyptienne, ce sont près de 180 000 enfants qui ramassent et trient les ordures. 

En Côte d’Ivoire, plus de 8 000 enfants sauvés

Les pays africains ne restent pas sans agir face à ce phénomène. En Côte d’Ivoire, le Comité national de surveillance des actions de lutte contre la traite, l’exploitation et le travail des enfants (CNS) et le Comité interministériel de lutte contre la traite, l’exploitation et le travail des enfants (CIM) ont mis en œuvre trois plans d’action nationaux, le premier de 2012 à 2014 et le second de 2015 à 2017. Le troisième plan est en cours : doté de 76 milliards de francs CFA (environ 116 millions d’euros), il a été initié en 2019 et s’étendra jusqu’en 2021. Dans le cadre de ces plans, des campagnes de sensibilisation ont été mises en place pour alerter sur les effets délétères du travail forcé sur les enfants, au premier rang desquels les risques sanitaires et psychologiques et la non scolarisation.

Placés sous la responsabilité de la Première Dame ivoirienne, Dominique Nouvian Ouattara, le CNS et le CIM ont permis de prendre en charge plus de 8 000 enfants à ce jour. Dans la ville de Soubré, la Fondation Children of Africa créée par Mme Ouattara a construit un centre d’accueil pour recueillir les enfants avant leur réintégration dans leurs familles d’origine. Deux autres centres devraient voir le jour prochainement dans le centre et au nord de la Côte d’Ivoire. Le pays redouble d’efforts. En août dernier, sous l’impulsion de la Première Dame, la sous-direction de la Police nationale chargée de la lutte contre la traite des enfants a reçu deux véhicules de type 4×4 ainsi que du matériel informatique et de bureau. Ces dons doivent contribuer à accélérer la lutte contre le travail des enfants, ainsi que l’a expliqué Patricia Yao, secrétaire exécutive du CNS.

Quitter la mine pour regagner l’école

En République démocratique du Congo, des moyens considérables sont également dévolus à la lutte contre l’exploitation des enfants. Le 17 avril dernier, la Banque africaine de développement (BAD) a donné son feu vert au financement de 84,36 millions de dollars (environ 76,33 millions d’euros) en faveur du Projet d’appui au bien-être alternatif des enfants et jeunes impliqués dans la chaîne d’approvisionnement du cobalt (PABEA-Cobalt). Parmi les 40 000 enfants travaillant dans les mines en RDC, l’Unicef estime qu’environ 14 850 – dont 54 % de filles – travaillent sur des sites d’extraction de minerais de cobalt. L’objectif du programme PABEA-Cobalt est de parvenir à ce que les enfants quittent les sites miniers pour intégrer des écoles et des centres de rattrapage scolaire.

Le cercle vicieux de la pauvreté

Ces initiatives salutaires se confrontent à une réalité de terrain complexe, ainsi que le soulignent Cosmas Bernard Meka’a et Olivier Ewondo Mbebi, qui ont étudié les déterminants du travail des enfants au Cameroun. Selon les auteurs, les ménages recourent au travail des enfants en raison de leur pauvreté : “Dans les pays en développement, de très nombreux ménages – notamment des campagnes – sont pauvres et sujets à des chocs négatifs, les mécanismes formels permettant de les compenser (accès aux marchés financiers, existence d’assurances) étant par ailleurs limités, et souvent même inexistants. Les ménages ont alors tendance à recourir au travail des enfants comme instrument de réponse”. Ainsi, une baisse brutale de revenu est positivement associée à un travail plus fréquent des enfants.

Pourtant, selon la FAO, le travail des enfants perpétuerait en fait l’état de pauvreté des mineurs, de leurs familles et de leurs communautés. Un cercle vicieux relevé par Kailash Satyarthi, militant indien des droits de l’enfant et du droit à l’éducation : « J’ai vivement plaidé afin que la pauvreté ne soit pas une excuse pour continuer à exploiter et à faire travailler les enfants. Le travail des enfants perpétue la pauvreté. Le travail des enfants crée la pauvreté. Si les enfants sont privés d’éducation, ils sont destinés à rester pauvres tout au long de leur vie. Il y a donc une relation triangulaire entre le travail des enfants, la pauvreté et l’analphabétisme. ».

Alors que l’OIT a proclamé l’année 2021 Année internationale de l’élimination du travail des enfants, elle appelle les États membres à poursuivre leurs efforts afin de rendre possible un monde où aucun enfant ne sera exploité ou contraint de travailler. 

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