Comment encadrer le recours à la médecine esthétique ?

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  • Publié le: mardi 18 avril 2023

Très populaires sur les réseaux sociaux, les filtres beauté sont de plus en plus réalistes, au point d’entraîner, chez certaines adolescentes, des troubles de dysmorphophobie – voire de les faire franchir le pas de la médecine esthétique, souvent via des pratiques illicites.

Avec 250 millions de vidéos cumulées et 9 millions d’utilisateurs, le filtre « Bold Glamour » est la nouvelle sensation sur TikTok. En apparence bien innocent, cet outil dirigé par une intelligence artificielle permet à ses utilisateurs d’afficher une image d’eux-mêmes quasi « parfaite » : lèvres pulpeuses, nez affiné, pommettes saillantes, sourcils rehaussés et symétriques… Le tout, avec une confondante impression de réalisme, qui explique tant son succès auprès des jeunes usagers du réseau social que ses dangers. Car, « à force de se regarder à travers des filtres qui gomment toute imperfection, le moindre petit défaut physique devient une obsession. Et cela peut ainsi engendrer de la dysmorphophobie », met en garde le psychologue Michaël Stora.

 

Ressembler à une version améliorée de soi-même

Désignant un trouble mental caractérisé par l’obsession vis-à-vis d’un défaut physique le plus souvent imaginaire, la dysmorphophobie est intimement liée à l’estime de soi. 2,5% de la population en souffrirait et le phénomène toucherait en priorité les plus jeunes, une catégorie de la population plus influençable et particulièrement sensible aux standards de beauté imposés sur les réseaux sociaux.  Les conséquences de cet incessant et impitoyable concours de beauté virtuel sont, quant à elles, bien réelles.

 

Ainsi, le docteur Adel Louafi, président du syndicat national de chirurgie plastique reconstructrice et esthétique (SNCPRE), constate une « proportion non négligeable de patients de 18 à 30 ans qui arrivent (en consultation) soit avec des images filtrées d’eux-mêmes, soit avec des images d’influenceurs ou d’instagrameuses ». Une observation corroborée par une enquête menée en 2019 par la rédaction du Parisien, selon laquelle les 18-34 ans sont, désormais, plus nombreux que les 50-60 ans à tenter l’expérience de la médecine esthétique pour correspondre à la version améliorée d’eux-mêmes que les filtres et les stars des réseaux sociaux leur font miroiter.

 

Comment repérer des pratiques illégales et dangereuses ?

À cela viennent s’ajouter d’inquiétantes dérives. Car les réseaux sociaux ne se contentent pas de faire la promotion, auprès de leurs jeunes abonnés, d’une beauté inatteignable ; ils constituent aussi un espace, non régulé, de publicité pour des actes de médecine esthétique réalisés hors de tout cadre légal. Autrement dit, les plateformes sociales créent le problème et offrent, immédiatement, la (fausse) solution. Sur Instagram et TikTok foisonnent ainsi les comptes d’esthéticiennes non reconnues, de pseudo-spécialistes et de médecins qui n’en ont que le nom, qui proposent à leurs milliers d’abonnés des opérations low cost, souvent réalisées dans des conditions sanitaires déplorables. Certains de ses escrocs 2.0 vont même, comme l’a révélé un récent reportage du magazine Envoyé Spécial, jusqu’à proposer des « formations » clandestines aux injections d’acide hyaluronique, qui tournent parfois à la catastrophe.

 

Publicités sur internet, prix cassés, manque de recommandations clients ou encore absence de devis sont donc des signes avant-coureurs dont il est important de se méfier lors de la recherche d’un professionnel de médecine esthétique. Car les séquelles de ces pratiques sauvages peuvent s’avérer dramatiques pour leurs victimes : infections, gonflements du visage, nécroses, paralysies, amputations, etc.

 

Bien qu’elles ne reflètent pas la réalité de la profession dans son ensemble, ces pratiques illégales, en plus de nuire aux victimes, font aussi du tort et de l’ombre aux professionnels assermentés qui exercent leurs fonctions dans un cadre légal. Compétents et légitimes, ces médecins esthétiques sont généralement dotés d’une formation médicale solide et d’une expérience significative acquise dans des établissements reconnus et réglementés. Des établissements qui, de façon générale, ne bénéficient pas de la même couverture médiatique et promotionnelle que leurs supposés équivalents.  Également plus discrets sur les réseaux sociaux, ces cabinets misent avant tout sur le bouche-à-oreille et les recommandations de leurs propres patients. Autant d’éléments et d’indices autour desquels il est important de communiquer pour protéger les plus jeunes et les plus naïfs des pratiques illicites.

 

 

Bientôt une réglementation pour protéger les plus jeunes

Naïveté, défaut d’information, vulnérabilité psychique, pression sociale, flou réglementaire… Pour tenter de mettre de l’ordre dans cette jungle, les pouvoirs publics viennent d’annoncer, par la voix de Bruno Le Maire, une proposition de loi encadrant les activités des influenceurs du Web. Parmi les mesures annoncées, l’interdiction de la publicité des produits pharmaceutiques, ou encore celle de la promotion de « la prescription, la délivrance, la vente, la réalisation ou la consommation des actes, procédés, techniques et méthodes à visée esthétique réservés aux professionnels de santé ainsi que des interventions de chirurgie ». Dans le même ordre d’idées, « les contenus (…) comprenant des images ayant fait l’objet d’une modification par tous procédés de traitement d’image doivent être accompagnés de la mention : « Images retouchées » », propose le texte de loi. Le début d’une salutaire prise de conscience ?

 

 

 

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