Tiers payant intégré : petite réforme, grandes conséquences ?

tiers payant
  • Publié le: mercredi 8 février 2023

Et si, pour l’acquittement du ticket modérateur, l’assurance maladie obligatoire remplaçait les complémentaires santé ? Le projet, dans les cartons du Haut conseil pour l’avenir de l’assurance maladie (HCAAM) depuis plusieurs mois, pourrait se concrétiser dans le courant de l’année 2023. Une réforme technique, mais loin d’être anodine.

Avec son projet de tiers payant intégré, le gouvernement compte envoyer un signal fort : ôter aux complémentaires santé la responsabilité de l’acquittement du ticket modérateur, pour le confier à l’assurance maladie. Un passage du privé, au public.

Seront ainsi concernées une grande partie des dépenses de santé des Français, des médicaments aux soins de ville, du reste à charge hospitalier aux lunettes et prothèses auditives, qui seront désormais intégralement remboursées par la sécurité sociale, et plus seulement partiellement. Objectif gouvernemental affiché : contenir les dépenses de soins des Français en excluant les mutuelles du dispositif. En cause, les coûts de ces dernières.

En effet, avec des frais de gestion qui se sont élevés à 7,5 milliards d’euros en 2018 selon la Cour des Comptes, les mutuelles sont accusées de peser trop lourd dans le portefeuille des Français et de consacrer une part trop importante de leurs budgets à des dépenses de marketing.

Mais les mutuelles seront aussi et surtout les premières victimes de cette réforme du tiers payant. Évincées dans le processus de remboursement du ticket modérateur, elles voient leur modèle économique et leur raison d’être s’évanouir. Au point probablement de s’effacer progressivement dans les prochaines années, faute de marges suffisantes sur les quelques missions que leur laisse le cadre réglementaire strict qui les encadre.

Une révolution dans le système de santé français hérité de l’après-guerre, dont l’équilibre reposait précisément sur deux piliers complémentaires : un dispositif public et des solutions privées.

 

Une réforme du tiers payant, beaucoup d’inquiétude

Car pour le secteur privé des complémentaires santé, une telle bascule représente une véritable menace : près de 60 000 emplois sont concernés. Et la colère est d’autant plus forte chez les mutualistes qu’ils rappellent que le système de remboursement des soins français est justement l’un des plus performants au monde, précisément grâce à cet équilibre entre privé et public : en 2022, 78% des remboursements ont été assurés par la sécurité sociale et 14% par les mutuelles, laissant un reste à charge parmi les plus bas des pays de l’OCDE.

Une colère des professionnels du secteur qui se conjugue à l’inquiétude pour les patients et les assurés : le modèle privé des complémentaires offrait par nature une multitude de solutions de contrats. Selon les profils, les pathologies et les budgets de chacun, Les 400 organismes d’assurance complémentaire santé existant en France se différenciaient de la sécurité sociale par un accompagnement personnalisé de leurs assurés. Une souplesse forcément incompatible avec le modèle de la sécurité sociale dont le but n’est précisément pas de s’adapter aux attentes de chacun, mais d’offrir un remboursement égalitaire des soins.

En résumé : moins de souplesse et moins d’accompagnement, le tout pour contourner des mutuelles qui, pourtant, remplissent plutôt bien la mission qui leur a été confiée par l’État en complétant efficacement l’offre de remboursement des soins. Enfin et surtout, une mesure qui ne répond pas réellement aux inégalités de santé, celles-ci concernant bien plus l’accès au soin que son remboursement.

Avec le projet gouvernemental de tiers payant intégré, ce sont bien les mutuelles qui sont évincées du système de santé. Une pilule difficile à avaler… et non remboursée.

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