Delphine Ernotte entend donner de la voix à ceux qui n’en ont pas

  • Publié le: lundi 5 octobre 2020

Première présidente de France Télévisions à être reconduite à son poste, Delphine Ernotte pourrait bien être également la première française à prendre la présidence de l’audiovisuel public européen. Dans un long entretien au magazine Forbes, elle revient sur le rôle de service public du groupe qu’elle dirige, à l’heure de la pandémie et de ses conséquences sur le milieu culturel.

On lui doit une féminisation des personnages de séries et des salariés du groupe, une aide conséquente à la création audiovisuelle hexagonale, et une promotion grandissante des minorités. Celle qui vient d’être reconduite à la tête de France Télévisions tente de consolider une réforme importante du service public à l’occasion d’un nouveau mandat de cinq ans.

Sa source d’inspiration ? Angela Merkel. Delphine Ernotte rapporte une discussion édifiante avec la dirigeante allemande à qui elle demande comment elle a fait « pendant toutes ces années, pour supporter tous ces hommes qui vous coupaient la parole et ne vous disaient pas bonjour ? ». Angel Merkel lui répond « J’ai toujours eu le sentiment de faire partie d’une minorité parce que je suis une femme et que je viens d’Allemagne de l’Est« .

« Favoriser l’inclusion sociale, et la diversité des origines « 

Minorité, Delphine Ernotte en est une, et le revendique, dans un monde de pouvoir dominé par les hommes. Ce qui lui permet aujourd’hui de savoir s’adresser à tout le monde, et de mener un dialogue social en interne, sans trop de heurts. « A France Télé, j’ai toujours privilégié la concertation et la négociation« . « On a inventé une méthode par l’expérimentation pendant laquelle nous poursuivions les discussions« , et négocions « sur du concret« .

Sortir du rapport de force, rétablir l’équilibre, et donner plus de voix à celles et ceux qui n’en ont pas, à la scène comme à la ville, restent ses priorités pour son nouveau mandat. Par une politique volontariste, elle souhaite consolider sa promotion de la diversité sur les antennes de France télévisions. Le 14 novembre 2019, elle annonçait la mise en place de quotas, « pour les femmes réalisatrices pour commencer, et de manière plus étendue à l’ensemble des créateurs« . Son objectif à terme : « favoriser l’inclusion sociale, et la diversité des origines sociales, culturelles ou géographiques« .

Crédibiliser la programmation culturelle

Car selon le baromètre 2019 de la diversité de la société française, publié mardi 29 septembre par le CSA, la télévision continue à valoriser de manière excessive les hommes blancs urbains et CSP+. « Une part de la société française reste encore ignorée des médias« . En première ligne : les femmes (39%), les habitants des banlieues (7%), et les personnes handicapées (0,7%). Aujourd’hui, le CSA considère qu’il est « plus que nécessaire de montrer le pays dans toutes ses diversités pour lutter contre l’ignorance et toutes formes de préjugés ou de discriminations« .

Côté programmation, Delphine Ernotte a décidé d’intégrer un transfuge de Canal+ et de Netflix, Diego Buñuel (petit fils de Luis Buñuel) et de le nommer directeur des programmes, afin de crédibiliser les propositions audiovisuelles du groupe. En parallèle, France Télévisions construit, avec TF1 et M6, la plateforme de streaming « Salto », qui proposera à la mi-octobre une alternative à Netflix ou Amazon et rendra accessible des programmes inédits, et des avant-premières de fictions des maisons-mères.

Partenaire fidèle de la culture

Delphine Ernotte entend également renforcer les émissions d’investigation, type Cash investigation ou Envoyé spécial, avec la création d’une rubrique « Ils font la France« , qui permet de donner un peu plus de poids au volet constructif et pédagogique de ces émissions. « Il faut prendre garde à ne pas alimenter certaines formes de populisme« .

La dirigeante rappelle également au magazine Forbes la mission de service public de France Télévisions, à l’heure où les activités culturelles sont ralenties, voire empêchées par les restrictions dues à la crise sanitaire. « La télévision a (…) un rôle majeur à jouer de partenaire fidèle de la culture, du théâtre, du cinéma, du livre, etc., dans une période où ce secteur subit de plein fouet les conséquences de la pandémie » rappelle Delphine Ernotte.

Tout un programme.

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